
La Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU a réclamé à la France une «enquête approfondie» sur les violences policières qui se sont produites pendant les manifestations des gilets jaunes depuis la mi-novembre.
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Dans un discours prononcé devant le Conseil des droits de l’homme à Genève, Michelle Bachelet a déclaré que lesgilets jaunes manifestent contre «ce qu’ils considèrent comme (leur) exclusion des droits économiques et de (leur) participation aux affaires publiques». «Nous encourageons le gouvernement (français) à poursuivre le dialogue et demandons urgemment une enquête approfondie sur tous les cas rapportés d’usage excessif de la force», a-t-elle ajouté. Elle Bachelet a rappelé que «les inégalités touchent tous les pays» et que «même dans des Etats prospères, des gens se sentent exclus des bénéfices du développement et privés de droits économiques et sociaux». Elle n’a toutefois cité que la France comme pays prospère, mais a dénoncé les répressions violentes des manifestations qui se sont produites récemment au Soudan, au Zimbabwe et en Haïti.
Les manifestants «réclament un dialogue respectueux et de vraies réformes. Et pourtant, dans plusieurs cas, ils sont accueillis par un usage violent et excessif de la force, par des détentions arbitraires, des tortures et même selon certaines informations des exécutions extra-judiciaires», a-t-elle déploré.
Le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, a répondu à ces propos sur Twitter, s’étonnant de voir la France sur la même liste que le Venezuela ou Haiti, où ont lieu des troubles, et a rappelé que des enquêtes étaient en cours.
La France citée par Michelle Bachelet entre Haïti (41 morts) et le Venezuela (où N. Maduro refuse l’aide humanitaire à son peuple), est-ce bien raisonnable ?
Les Français s’expriment chaque jour dans le #GrandDébat.
Les suspicions de violences policières font l’objet d’enquêtes.— Christophe Castaner (@CCastaner) 6 mars 2019
Le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a lui aussi déclaré qu’il fallait «s’étonner» de voir la France citée «sur une liste entre le Venezuela et Haïti», «où il y a eu des morts». Interrogé pour savoir si les critiques de Michelle Bachelet pouvaient affaiblir la voix de la France sur les violences dans d’autres pays, il a répondu: «Je ne crois pas que ça l’affaiblisse (…) Je crois que la position de la France dans les instances internationales est multiple, sur le fond démocratique, stratégique, commerciale et économique». Il a également tenu à souligner que «le niveau d’inclusion économique et démocratique en France est, selon les standards de l’ONU, un des plus élevés au monde», rappelant que la France se conforme «aux recommandations toujours utiles formulées par l’Organisation des Nations unies» avec «diligence».
Fin février, le commissariat aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe avait pour sa part demandé à la France de «mieux respecter les droits de l’homme», «ne pas apporter de restrictions excessives à la liberté de réunion pacifique», et «suspendre l’usage du lanceur de balle de défense». Fin février, en France, le défenseur des droits Jacques Toubon a également demandé la suspension de l’usage des LBD en raison de leur «dangerosité» et des «risques disproportionnés» qu’ils font courir.
Depuis le début en France du mouvement de contestation des gilets jaunes à la mi-novembre, l’Inspection générale de la Police nationale (IGPN) a été saisie de 162 enquêtes. Plusieurs manifestants affirment avoir été blessés par des tirs de lanceur de balle de défense (LBD), une arme qui suscite de vives controverses.