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23 April 2024
0 13 minuti 5 anni

Le Premier ministre social-démocrate de la Finlande, Antti Rinne, en poste depuis le mois de juin, fait le point sur la situation de l’UE et de son pays, qui assure actuellement la présidence du Conseil européen.

Ex-syndicaliste, Antti Rinne, 56 ans, est depuis juin le Premier ministre social-démocrate de la Finlande, dont le pays assure la présidence tournante de l’Union européenne jusqu’à la fin de l’année. Avant le Conseil européen de Bruxelles qui démarre jeudi à Bruxelles, il revient sur l’état d’esprit des Vingt-Sept, sur le futur départ de l’UE des Britanniques et les relations de la Finlande avec la Russie.

Quelle marge de manœuvre reste-t-il pour éviter un «hard Brexit», un divorce UE-Royaume Uni sans accord ?

La position de la Finlande et de l’UE reste inchangée. Nous voulons accomplir cette séparation – dont nous ne voulons pas – d’une manière organisée avec le Royaume-Uni. L’accord de sortie négocié reste la meilleure alternative pour cela. Nous sommes prêts à discuter avec eux des alternatives juridiquement opérationnelles pour remplacer le «backstop» [filet de sécurité censé éviter le retour d’une frontière physique entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord, ndlr], mais il ne reste que très peu de temps.

Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, a-t-il vraiment tenté de négocier sérieusement pour tenter de parvenir à un deal avec l’UE ?

Je l’ignore. Les négociations entre l’UE et le Royaume-Uni se tiennent tout de même encore entre le négociateur de la Commission pour le Brexit, Michel Barnier, et le gouvernement britannique…

La sortie du Royaume-Uni peut-elle affaiblir encore plus durablement une Union européenne qui assiste à une montée sans précédent des mouvements populistes d’extrême droite ?

L’UE est la plus forte quand elle est unie et défend courageusement ses valeurs fondamentales : la démocratie, les droits de l’homme et l’état de droit. Elle doit faire preuve d’une tolérance zéro face à toutes formes d’attaques contre ses principes. L’UE attire plus que jamais. Les sondages d’opinion favorables culminent à leur plus haut niveau. Et les partis pro-européens l’ont largement emporté lors des élections européennes de mai. A nous de jouer pour que les partis responsables, qui promeuvent réellement une amélioration du bien-être et des revenus des citoyens européens, réussissent. Quand ils y parviennent, les citoyens réalisent combien les promesses des populistes sont des promesses.

L’Europe semble plus inaudible que jamais sur la scène internationale…

Raison de plus pour, après le Brexit, qu’elle regarde vers l’extérieur pour renforcer son rôle global. L’UE fait preuve de leadership dans le multilatéralisme : lutte contre le changement climatique, conclusion de grands accords de libre-échange, notamment avec le Japon ou la Corée du Sud. La Finlande plaide pour renforcer la coopération en matière de sécurité et de défense de l’UE. Et pour asseoir une relation transatlantique durable. J’espère qu’après le Brexit, le Royaume-Uni ne se renfermera pas sur lui-même mais qu’ensemble, en tant qu’Europe, nous continuerons à développer le système multilatéral.

Vous avez pu de justesse former un gouvernement pour éviter à la Finlande d’être gouvernée par l’extrême droite et le Parti des Finlandais. Crise sociale ou crise identitaire : quelles sont les principales raisons de la montée en puissance des partis populistes nationalistes ?

Nous sommes parvenus à former un gouvernement, composé de plusieurs partis – comme souvent en Finlande – qui ont tous en commun la volonté de réformer l’Etat-providence, de renforcer l’éducation et de s’attaquer à trouver des solutions aux plus grandes questions de l’humanité, comme la mondialisation ou le changement climatique. Nous, démocrates, proposons des solutions pour répondre aux inquiétudes des gens. Les populistes eux, n’apportent aucune solution : que des paroles creuses sans fondement.

Que répondez-vous à Vladimir Poutine qui a jugé, en juin, «obsolètes» les démocraties libérales ?

Les Finlandais ont bâti leur Etat, renforcé leur démocratie et amélioré le quotidien et la vie des citoyens par des moyens démocratiques. Quand l’état de droit fonctionne, l’économie, la prospérité et le bien-être collectif se trouve renforcé. Cela n’a pas toujours été le cas par le passé quand les libertés étaient sous contrôle, la société moins sûre, et la richesse concentrée dans les mains des plus riches. Regardons vers le futur et développons toujours plus une démocratie fondée sur les libertés publiques.

La vague de manifestations qui ébranlent la Russie traduit un tournant dans les vingt ans de règne sans partage de Poutine ?

Les citoyens de la planète se rendent compte qu’il est possible d’avoir une influence sur le développement de la société par l’exercice des droits civiques. Voter, exprimer sa propre opinion, sont des moyens pour chercher un meilleur avenir, un meilleur lendemain. Nous assistons à un essor démocratique planétaire.

Vous partagez 1 340 kilomètres de frontière avec la Russie : la dérive autoritaire et expansionniste du pays vous alarme-t-elle ?

La Russie est un grand voisin, aussi bien pour la Finlande que pour l’UE. Nos relations sont pragmatiques et aussi bonnes qu’elles peuvent l’être dans les circonstances actuelles. Nous n’acceptons pas les actions de la Russie en Crimée ou dans l’est de l’Ukraine. Néanmoins, il est important d’avoir un dialogue sur les enjeux où il est possible d’avancer, comme la défense de l’environnement ou la lutte contre le changement climatique.

L’Europe doit-elle en finir le plus vite possible avec les sanctions commerciales décrétées contre la Russie depuis 2014 ?

Non. Les sanctions seront suspendues quand les raisons pour lesquelles elles ont été décrétées auront disparu : cela passe par la résolution du conflit en Ukraine. La Russie a la principale responsabilité. Il est trop tôt de parler d’un changement significatif, il faut déjà que les accords de Minsk [projet de résolution du conflit signé en 2015 mais jamais appliqué, ndlr] soient intégralement appliqués.

Vous êtes le premier Premier ministre social-démocrate depuis seize ans en Finlande. La preuve que la social-démocratie, qui a quasi disparu de la carte des gouvernements européens, peut émerger à nouveau ?

La social-démocratie est un mouvement d’avenir. Nous avons réussi à la renouveler et à construire une vision du futur avec laquelle on construit une société plus équitable, plus compétente et plus sûre. Nous écoutons les gens et nous discutons avec eux, nous rétablissons la confiance dans la politique. Nous offrons des solutions et n’énumérons pas seulement des problèmes. C’est la recette de la réussite pour n’importe quel parti, mais tout particulièrement pour les sociaux-démocrates ; une pensée orientée vers l’avenir et la volonté d’avancer sont dans notre ADN.

Vous avez fait campagne contre les politiques d’austérité et promis de relancer les dépenses publiques dans la santé, l’éducation et les infrastructures ? Une façon de rompre aussi avec le diktat des politiques d’austérité européenne ?

Nous avons fait campagne en faveur des investissements pour l’avenir, contre la politique de coupes budgétaires. Investir dans les compétences, l’éducation et le bien-être – donc dans l’avenir – est une politique économique responsable qui renforce l’emploi et aussi la solidité des finances publiques à long terme. Notre gouvernement mène donc une politique financière contracyclique, ce qui signifie que dans une situation économique difficile on ne contribue pas à rendre la situation encore plus difficile par des réductions budgétaires supplémentaires. Investir dans l’éducation et l’infrastructure sont des investissements d’avenir importants, sur lesquels la future croissance est bâtie. Les règles de l’UE doivent permettre aux pays membres d’exercer une politique conjoncturelle raisonnable. Ne pas le faire, c’est s’exposer à des conséquences politiques graves, comme nous avons pu le constater ces dernières années dans différents pays du monde.

Vous avez assuré devant le Parlement européen que le «bien-être» et la «lutte contre les inégalités» incarnaient l’idéal européen. Un idéal trahi ?

La justice sociale n’a peut-être pas été suffisamment prise en compte dans les réponses à la crise financière et économique dans le passé. La Finlande, qui assure la présidence, et la future Commission ont chacune, de leur côté, la possibilité de contribuer à ce que cet objectif soit au centre de la politique de l’UE.

Finalement, le capitalisme est-il compatible avec la démocratie quand on voit la succession de crises, économiques, financière, sociale climatique qu’il génère ?

On commence enfin à remettre en question des sujets qui ont pendant longtemps été considérés comme des saintes vérités. Les décideurs politiques doivent s’assurer, comme le dit un proverbe finlandais, que l’économie de marché est «le valet de ferme et non le patron». En Finlande, nous avons réussi à combiner l’économie de marché et la pensée sociale-démocrate sur l’Etat-providence, et faire en sorte que l’économie soit au service des citoyens et non pas l’inverse.

Face à la crise climatique, vous venez de décider d’engager la Finlande vers la neutralité carbone d’ici à 2035. Comment, concrètement, comptez-vous y parvenir ?

Les premiers mots du programme de mon gouvernement sont le changement climatique parce que nous ne voulons pas qu’ils soient les derniers mots de l’humanité. La Finlande sera neutre en carbone en 2035 et négative en carbone rapidement après cette date. Cela passe par l’accélération des mesures de réduction d’émissions, le renforcement des puits de carbone, un programme climatique pour l’ensemble de l’aménagement du territoire. Nous devons investir de manière significative dans la protection de la nature, dans l’économie circulaire, dans le transport à faible émission de carbone, comme le ferroviaire ou le transport électrique ou les conversions de voiture avec le biogaz, qui génèrent moins d’émissions.

Comment instaurer de «justes» taxes carbones et concilier justice sociale et lutte contre le changement climatique?

Les mesures contre le changement climatique doivent être mises en œuvre d’une manière socialement équitable. Et les Etats membres de l’UE soutenus dans leur transition à l’énergie propre. Consolider le système d’échange de droits d’émission est un bon moyen d’orienter vers une utilisation d’énergie plus respectueuse du climat.

Christian Losson

Sorgente: «L’UE doit faire preuve d’une tolérance zéro face à toute forme d’attaque contre ses principes» – Libération

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