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Parmi les élèves et profs qui ont participé mardi au mouvement, la réforme du lycée et Parcoursup cristallisaient la protestation.

Ils ont commencé par tromper l’ennui. Disséminés au sein des nombreux cortèges de syndicats, entre le parvis de l’Hôtel de ville et la rue de Rivoli, les lycéens n’ont pu faire bloc lors de la manifestation parisienne organisée mardi à la suite de l’appel à la grève générale, faute d’une organisation unanime. Avant le départ du cortège à 14 heures, un petit groupe joue, hilare, au «jeu des RG» (comprendre renseignements généraux). L’idée: déceler le plus de représentants des RG dans la manif.

Mais passée la marrade, la motivation est solide et précise, avec la contestation de Parcoursup et de la réforme du lycée pour revendications principales. Camille, 15 ans, en seconde au lycée Henri IV (Varrondissement), a séché les cours sans prévenir ses parents pour être «là aujourd’hui, en soutien avec toutes les revendications sociales, mais aussi pour protester contre les réformes éducatives, notamment celle du lycée. Ces réformes impliquent de plus en plus de sélection, ça me fait peur. Si on n’est pas parmi les meilleurs, on n’aura pas d’avenir? J’ai la chance d’être à Henri IV mais je pense aux autres.» Elle poursuit: «Choisir son orientation dès la seconde ce n’est pas possible. En plus, je me sens obligée de prendre maths pour mon dossier avec ce système alors que ce n’est pas ce que je veux.» Un peu loin dans le cortège qui sillonne la rue de Rivoli jusqu’à la place de la Concorde, Vincent, 17 ans, en terminale S au lycée Honoré de Balzac (XVIIarrondissement), trimballe fièrement sa pinata en forme de cochon rose fluo tatoué d’un dollar. «Je voulais représenter quelque chose à détruire représentant la base du mal, de ces réformes: Macron, le libéralisme.» Il est coupé par le tonitruant slogan de ses camarades: «Lycéens en colère, la réforme elle pue sa mère.»

 «Génération test» et lassitude

Du même lycée, Filippo, 15 ans, en seconde, se voit en cobaye: «On est la génération test. Tout va trop vite, rien n’est organisé. On ne sait pas ce que les filières du supérieur attendent qu’on prenne comme spécialités, les programmes viennent de sortir, les profs ne sont pas formés à certaines matières comme l’informatique. Ça m’inquiète.»  En 1ère ES au lycée Jean-Jaurès à Montreuil, Elie, 16 ans, craint une augmentation des inégalités territoriales: «Un 15 à Montreuil n’est pas un 15 à Paris. On n’a juste pas la chance d’être au bon endroit. Je ne suis pas concerné par la réforme du bac mais je m’en préoccupe pour ceux qui viennent après moi et c’est lié à Parcoursup.»

Place de la Concorde, on croise Raphaëlle, prof d’anglais au lycée Brassens (XIXarrondissement). «On doit choisir dans notre lycée si on veut des dédoublements de classe en seconde, première ou terminale. On doit laisser un niveau de côté. On ne sait pas non plus comment seront faits les emplois du temps: on a commencé à nous dire qu’on pourrait travailler le samedi matin, tout en nous disant d’attendre juin pour en savoir plus. C’est le flou.» Margaux (1), enseignante de français au lycée technologique et professionnel Martin-Nadaud. (XXarrondissement) lance : «Depuis vingt ans, je vois la destruction du service public d’éducation. La réforme du lycée n’est qu’un moyen de nous dépecer. Celle de la voie pro est aussi dramatique puisqu’elle implique la baisse des heures des matières générales. On renonce à l’exigence intellectuelle. Je me demande si je vais pouvoir continuer ce métier.»

(1) Le prénom a été changé à la demande de l’intéressée.

Sorgente: Manif à Paris : «Lycéens en colère, la réforme elle pue sa mère» – Libération

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