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25 April 2024
0 11 minuti 5 anni

Le président de la République a souhaité que la reconstruction de la cathédrale soit achevée dans cinq ans. Un délai peu réaliste vu l’ampleur de la tâche, d’autant que les lieux sont loin d’être sécurisés.

Pour exprimer sa volonté après l’incendie de Notre-Dame de Paris, Emmanuel Macron tweete : «Alors oui, nous rebâtirons la cathédrale Notre-Dame, plus belle encore, et je souhaite que cela soit achevé d’ici cinq années, nous le pouvons.» Cinq années ? Un exploit, en somme. A cette injonction, le Premier ministre, Edouard Philippe, a ajouté mercredi une complication supplémentaire. Au Conseil des ministres, il a annoncé le lancement d’un «concours international d’architecture sur la reconstruction de la flèche». Cette reconstruction, «c’est un défi immense, une responsabilité historique, le chantier de notre génération et pour les générations qui nous succéderont». Si on a bien suivi, surtout pour les cinq prochaines années. Comment faire ?

Démarrer calmement

«La priorité, c’est la mise en sécurité des lieux», dit l’urbaniste Jean-Louis Subileau, spécialiste des calendriers serrés pour avoir mené à bien certains des grands travaux de Mitterrand. La sécurisation est une phase délicate. Pour être sûr que la cathédrale est encore solide sous les poutres consumées, «il va falloir ôter tout cela doucement», a expliqué au Moniteur Benjamin Mouton, architecte en chef des Monuments historiques et responsable de la cathédrale jusqu’en 2013. Dans le même temps, «il va falloir couvrir toute la nef et élaborer un système d’échafaudage considérable», complète l’architecte Philippe Prost, qui a réhabilité la Monnaie de Paris. «Avant de commencer, on a besoin de temps», résume-t-il.

Se passer des concours ?

Le droit permet de «gagner du temps en confiant le chantier directement aux architectes des Monuments historiques», précise Subileau. Et avec le concours annoncé par Philippe pour la flèche, là, c’est une colle. «Un concours avec quel cahier des charges ? Tant que le diagnostic n’est pas posé, on ne peut rien faire. Ou alors un dessin…» Sachant qu’on ne parle pas d’une girouette mais d’un ouvrage de 93 mètres à rebâtir sous la surveillance de l’Unesco.

Edouard Philippe a quand même un peu précisé sa pensée à la sortie du Conseil. La consultation devra «trancher la question de savoir s’il faut reconstruire une flèche, s’il faut la reconstruire dans les mêmes conditions, à l’identique […] ou s’il faut […] se doter d’une nouvelle flèche adaptée aux techniques et enjeux de notre époque».Toutes questions auxquelles un maître d’ouvrage est censé avoir répondu avant de lancer un concours.

Zapper les procédures ?

«Un gouvernement peut toujours faire voter une loi pour n’avoir aucune autorisation à demander à personne. Ça gagne du temps dans l’immédiat, mais d’autres délais arriveront à coup sûr derrière», prédit Philippe Prost. Jean-Louis Subileau rappelle aussi que pour choisir les entreprises qui réaliseront ce chantier de notoriété planétaire, «il serait dommage de ne pas respecter le droit des marchés publics». Avec le calendrier de ses appels d’offres.

Accepter le diagnostic

L’étape est impérative. Après le sinistre, «le bâtiment a sûrement perdu une partie de ses capacités de reprise de charge», estime Prost. En français courant : il supporte moins de poids. Calculer les tonnes qu’on peut lui poser sur le sommet, «ça prend du temps en études», dit-il encore. Certes, «on peut toujours procéder en temps masqué», dit de son côté Subileau. C’est-à-dire faire deux choses à la fois, le diagnostic et les études pour la suite par exemple. Le gain ? Pas spectaculaire.

Laisser sécher

Cet immense édifice de pierre a essuyé près de quarante-huit heures d’arrosage continu. Philippe Prost : «Tout cela doit sécher avant que l’on construise dessus, ça prend le temps que ça prend et on ne peut pas accélérer.» Combien de temps ? «Plusieurs mois. Pour qu’un cycle de séchage soit total, on estime qu’il faut une année.» En outre, une fois la pierre séchée, «elle peut se révéler tellement abîmée qu’elle devra être changée».

Trouver des ouvriers

Pas le plus facile. «La reconstruction va démarrer dans un goulet d’étranglement, parce qu’il y a beaucoup de chantiers en Ile-de-France. Entre le Grand Paris Express et les équipements des Jeux olympiques, tous les grands bureaux d’études sont déjà très occupés», fait remarquer Jean-Louis Subileau.

Interrogé à l’issue du Conseil des ministres sur ce télescopage de calendriers entre la reconstruction de la cathédrale et les JO, Edouard Philippe a répondu : «Cette reconstruction est un impératif collectif.» Certes, mais suffit-il de le dire ? «Nous sommes dans un moment de grande pénurie de personnel, constate Prost. Du coup, les prix que font les entreprises montent et comme les donneurs d’ordres ne peuvent pas suivre, la plupart des appels d’offres sont infructueux.» Phénomène encore plus aigu quand on cherche des compétences pointues. Le secrétaire général des Compagnons du devoir (lire ci-contre), Jean-Claude Bellanger, a averti d’un «manque de main-d’œuvre en tailleurs de pierre, charpentiers et couvreurs».

Se mettre d’accord

Sur ce qui doit être fait. Pour l’aspect extérieur, si l’on met de côté la flèche, il y a consensus sur une reconstitution à l’identique. Subileau accorde d’ailleurs à Macron d’avoir «peut-être voulu dire que dans cinq ans, la silhouette serait retrouvée, même sans les finitions». Prost reconnaît qu’il «n’y aura pas beaucoup de débats sur le volume et la silhouette. Mais sur la charpente, en revanche…» Doit-on, et même peut-on reconstituer la «Forêt» de poutres en chêne ? «Si on a d’autres matériaux, des composites, des bois conçus différemment, on peut déboucher sur des techniques plus rapides», ose Philippe Prost. Comme bien d’autres, il rappelle les précédents. La cathédrale de Chartres, dont les poutres ont été refaites en métal après un incendie en 1836, et celle de Reims, détruite pendant la Première Guerre mondiale, dont la charpente a été reconstruite en béton : après quatre ans de tranchées, la France n’avait plus un seul arbre debout.

A lire aussiLes Compagnons du devoir prêts à rebâtir Notre-Dame

Ces arguments, Benjamin Mouton, architecte de la cathédrale jusqu’en 2013, ne veut pas les entendre : «Il faut, à mon avis, reconstruire une charpente en bois. Cela fait partie de l’âme de l’édifice», a-t-il déclaré au Moniteur, tout en reconnaissant que «la ressource en bois est en effet un des problèmes». Peut-on trouver, en France si possible, le chêne nécessaire à un tel ouvrage ? Il ne suffit pas de proposer d’aller se servir dans les forêts de la Caisse des dépôts, comme l’a proposé son directeur général. «Il faut deux à trois ans pour qu’un chêne perde son eau», explique Philippe Prost. Le temps, encore. «Quand on veut que les choses soient bien faites et durables, il faut du temps», souligne-t-il. Benjamin Mouton voudrait «installer les compagnons sur le parvis de Notre-Dame, qu’ils travaillent aux yeux du public». Prost, lui, rêve d’un «chantier suffisamment mis en scène, pédagogique, pour devenir un projet partagé».

Plutôt que d’être accomplie au plus vite, la reconstruction de Notre-Dame devrait peut-être servir à prendre le temps de réfléchir. «On pleure parce que le bâtiment a mis des siècles à être fait et on voudrait le reconstruire en dix jours…» soupire Jean-Louis Subileau.


Court-circuit électrique ? «Point chaud» lié à une soudure ? Cigarette mal éteinte ? Le mystère sur les origines de l’incendie de Notre-Dame reste entier. En raison des conditions d’accès toujours très difficiles à la nef, les premières constatations demeurent spartiates. C’est donc sur les 40 premières auditions d’employés de la cathédrale et d’ouvriers du chantier de rénovation que s’appuient les enquêteurs pour dresser des hypothèses de travail. Parmi elles revient donc la possibilité d’un court-circuit généré par la câblerie des ascenseurs de chantier. Fait avéré en revanche, un dysfonctionnement du système d’alarme de la cathédrale a fait perdre un temps précieux aux agents de sécurité. A 18 h 20, la console reliée aux capteurs a détecté un incident, générant de facto une première alerte. Toutefois, le lieu associé à cette alerte n’était pas le bon et l’agent chargé de la vérification n’a rien constaté. Il a fallu attendre une seconde alerte, à 18 h 43, pour que l’agent identifie le lieu réel du départ de feu, à l’angle de la flèche. D’où un appel d’urgence aux pompiers passé peu avant 18 h 50. W.L.D.

Sibylle Vincendon

Sorgente: Opérations à chœur ouvert pour Notre-Dame – Libération

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